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9 Septembre 2014
Richard Foreman, Old-fashioned prostitutes et Idiot savant mise en scène par Bernard Sobel au Théâtre des Déchargeurs à partir de 21 h jusqu’au 27 septembre 2014
Richard Foreman (*1937) fut un habitué du Théâtre de Gennevilliers au temps où Bernard Sobel présidait aux destinées du théâtre. Il a fondé en 1968 le « Ontological-Hysteric-Theater » qui fut l’une des expressions du théâtre d’avant-garde post-soixante-huitard libérant le spectateur de sa position passive. Les deux pièces présentées aux Déchargeurs révèlent l’autre pan janusien de la personnalité de Bernard Sobel, une personnalité inquiète par la marche du monde, un monde ayant largué la boussole marxiste tant sous sa forme althussérienne que gramscienne.
Old-fashionned prostitutes (A true Romance) a été créée à New-York l’an dernier au Public Theater signant ainsi le retour au théâtre de Richard Foreman. Samuel, cinéaste de son métier, est le personnage principal de cette courte pièce. C’est un émule d’Hamlet pour son goût de l’introspection et de l’indécision. Un inconnu croisé dans la rue lui signifie d’aller à Berkeley. Est-ce bien le bon Berkeley ? Suzie, la compagne de ses descentes abyssales, lui suggère que c’est peut-être le philosophie George Berkeley que lui a indiqué l’oracle des boulevards. Lui demandant ainsi d’admettre enfin que seules les sensations sont accessibles à l’homme et que les grandes idées ne sont pas de ce monde. Théophile Sclavis parvient à nous rendre tangible, sensible, son débat intérieur. Le dernier mot de cette pièce métaphysique est « vide ».
La seconde pièce, Idiot savant fut créée quatre ans plus tôt dans le même théâtre. Théophile Scalis est maintenant un garçon de café lisse comme une image d’Epinal. La catharsis aurait-elle fait son œuvre ? Très vite mon cerveau s’est embrumé... L’AVC pointait peut-être à l’horizon. Un trop plein d’informations tue l’information. En dépit de mes efforts, je n’arrivais plus à suivre les élucubrations de l’Idiot Savant, ici magistralement interprété par un Frédéric Losseroy survolté, en tenue kaki d’archéologue, accompagné par ses deux consœurs Olga (Manon Payelleville) et Marie (Noémie Rambert), toutes aussi déjantées. Je connaissais le paradoxe du canard-lapin de Ludwig Wittgenstein mais c’est de la gnognotte comparativement au « Grand Canard ». Le mot final de la pièce fut « rien ». Un nihilisme parfaitement assumé de la part de Richard Foreman mais pour Bernard Sobel, j’en doute. J’y perçois une nostalgie.
Le canard-lapin de Ludwig Wittgenstein & Richard Foreman